D'autres vies que la mienne

Il n'est question que d'amour. Un livre sensible. Une narration précise, rigoureuse mais toujours sensible. La prouesse de l'écrivain, mais ce mot est très laid en même temps, est d'avoir su faire avec la vie des autres, un roman qui a aucun moment ne choisit l'obscénité ou la facilité des larmes et de l'apitoiement. Obscène cette pensée qu'on est touché par cette histoire d'abord et surtout parce qu'on la sait vraie. Là il n'en est rien On est toujours d'abord et surtout parce que l'auteur, Emmanuel Carrère sait avec talent montrer des hommes et des femmes dignes et tellement humain dans leur douleur. Ce couple qui a perdu sa petite fille dans le tsunami.

" Nous étions auprès de cet homme et cette femme à qui venait d'arriver ce qui peut arriver de pire au monde, et à nous rien du tout. Pourtant, même s'il y avait des arrières-pensées, et certainement il y en avait, certainement s'ils avaient pu échanger les places et en nous précipitant dans le malheur se sauver ils l'auraient fait, tout le monde le ferait, tout le monde préfère ses enfants à ceux des autres, cela s'appelle être humain et c'est bien comme cela, pourtant je pense que ce soir-là, au cours de ce dîner, ils ne nous en voulaient pas." (p 59)

Dignité et leçon de vie.

"Les gens qui disent : ça vient de la tête, ou du stress, ou d'un conflit psychique pas résolu, j'ai envie de les tuer, dit-il, et j'ai aussi envie de les tuer quand ils disent ce qui va avec: tu t'en es sorti parce que tu t'es battu, parce que tu as eu du courage. Ce n'est pas vrai. Il y a des gens qui se battent, qui sont très courageux et qui ne s'en sortent pas." (p 138)

Emmanuel Carrère sait raconter leur histoire.

© Gilda Gonfier - 28 décembre 2009

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